Millien Pierre Jean, plus connu sous le nom de Pierre Jean, artiste aux multiples talents, a annoncé la sortie prochaine de son nouvel album. Un projet longtemps mûri malgré les défis sécuritaires et personnels. Originaire de Lascahobas dans le département du Centre, le musicien et producteur a été sacré champion de Digicel Stars en 2013 et d’Ayiti Mizik Festival en 2020.
« Cette année, que l’on le veuille ou non, je sortirai mon album », a affirmé Pierre Jean avec détermination. Une déclaration qui résume son engagement inébranlable envers sa musique. Dans une interview exclusive accordée à Ticket Magazine, l’artiste a expliqué qu’il voulait initialement attendre une amélioration de la situation sécuritaire en Haïti, où plus de 80 % de Port-au-Prince est sous le contrôle des gangs. Cependant, face à une crise qui semble s’éterniser, l’interprète de Padon a décidé de ne plus reporter son projet. « J’ai réalisé que si j’attendais que la situation se calme, je ne sortirais jamais mon album », a-t-il confié.
Pierre Jean a exprimé son rêve d’une tournée nationale pour promouvoir son album dans tous les départements du pays. Un défi de taille dans un contexte où la vie nocturne et les événements culturels sont quasi inexistants. « Je ne peux aller me produire nulle part. Je ne peux même pas me rendre aux États-Unis, parce qu’en ce moment, nous sommes isolés du reste du monde », a-t-il déploré, évoquant l’arrêt des vols sur Port-au-Prince et le blocage des routes par les gangs armés.
Des confidences émouvantes
L’artiste s’est également livré sur les moments marquants de sa vie. « Ma plus belle expérience a été de regarder le monde entier danser ma musique », a-t-il partagé avec fierté. Mais derrière cette joie se cache une douleur profonde : la perte de son père, qu’il n’a toujours pas réussi à accepter. « Mon père ne peut pas être là pour regarder son fils faire danser le monde entier », a-t-il regretté, rappelant que c’est son père qui avait éveillé en lui la passion pour la musique.
Pierre Jean a aussi révélé sa plus grande faiblesse. Sa timidité. « J’ai pensé que c’est quelque chose sur lequel je dois travailler », a-t-il admis, montrant une vulnérabilité qui contraste avec son énergie scénique.
Vagabon : un avant-goût de l’album
Son dernier single en date, Vagabon, en collaboration avec Ti Joe Zenny, a donné un aperçu de ce que promet son prochain album. Ce titre, déjà acclamé par le public, a marqué le coup d’envoi d’un projet musical ambitieux. Rappelons que les chansons de Pierre Jean sont généralement acclamées pour leurs rythmes entraînants et leurs textes profonds.
Un cri du cœur pour Haïti
Pierre Jean ne s’est pas contenté de parler de musique. Il a aussi exprimé son désarroi face à la situation critique de son pays. « Je suis encore plus affecté par la situation du pays. Il n’y a pas de vie nocturne. Ce qui m’a le plus blessé, c’est le fait que la situation continue de se détériorer », a-t-il déclaré, évoquant les attaques répétées des gangs dans la capitale haitienne et les milliers de familles déplacées. « Qu’avons-nous fait avec ce pays ? Jusqu’où irons-nous avec lui ? », s’est-il interrogé, avouant avoir fondu en larmes récemment face à l’impuissance qu’il ressent.
En ce qui concerne l’annulation du carnaval national, l’artiste a pris position. « Le carnaval, ce n’est pas quelque chose que j’aime vraiment. Parfois, on me conseille de sortir une meringue pour marquer le moment, mais je crois que le budget alloué à ces festivités aurait dû être réaffecté aux besoins des déplacés internes », a-t-il plaidé, soulignant l’urgence de l’insécurité alimentaire en Haïti.
Un appel à l’action
Pierre Jean se voit avant tout comme un citoyen haïtien. « J’ai pensé que je devais, tout comme beaucoup d’autres, aider le pays. Si je dois prendre les rues pour que quelque chose change, je le ferai », a-t-il affirmé avec conviction. Pour lui, le changement ne viendra que si tous les Haïtiens se mobilisent. « Si les Haïtiens se mettent debout, ils pourront changer ce pays », a-t-il conclu, lançant un message d’espoir et de résilience.